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Deuxième série d’auditions de la commission d’enquête Uber Files : Après le pipeau de Dussopt, l’(H)ARPE de Borne !

La deuxième journée d’auditions de la commission d’enquête parlementaire sur les Uber Files a eu lieu jeudi 2 mars. Nous avons auditionné le journaliste d’investigation du journal britannique The Guardian, Harry Davies, qui a été le chef de file sur le dossier Uber Files. Puis, nous avons entendu l’ensemble des syndicats de livreurs de plateformes ainsi que des VTC.

La première journée d’auditions avait déjà confirmé et précisé le rôle déterminant d’E. Macron dans l’implantation et le développement d’Uber en France lorsqu’il était ministre de l’Economie. Aujourd’hui, force est de constater que la macronie persiste dans son soutien au modèle Uber. Les auditions du 2 mars ont permis de rappeler ce qu’est la réalité du travail dissimulé organisé par les plateformes, mais aussi le soutien constant du gouvernement vis-à-vis des intérêts d’Uber et autres plateformes de l’ubérisation. 

  1. Le pipeau de Dussopt

Lors de ma dernière question d’actualité au gouvernement, j’ai interpellé O. Dussopt, ministre du Travail, au sujet de son recours contre la décision du tribunal administratif de Paris enjoignant l’Inspection du travail d’enquêter sur Uber pour travail dissimulé. Pourtant, dans son arrêt historique du 4 mars 2020, et plus récemment le 25 janvier dernier, la Cour de cassation a confirmé l’existence d’un lien de subordination entre les chauffeurs et la plateforme Uber, requalifiant ainsi leur contrat de travail en statut de salarié. Depuis, les requalifications des chauffeurs VTC et des livreurs ne cessent de se multiplier aux Prud’hommes, et le Parlement européen s’est positionné en faveur d’une directive sur la présomption de salariat grâce, notamment, à notre eurodéputée Leïla Chaibi. Même les eurodéputés macronistes ont voté pour ! Seul le gouvernement français s’y refuse. A ma demande et à celle du groupe parlementaire de La France insoumise – NUPES, nous exigeons l’organisation d’un débat et d’un vote à l’Assemblée nationale sur la position de la France sur la directive européenne présomption de salariat. 

  1. La réalité des conditions de travail des livreurs et le faux statut d’indépendant des chauffeurs VTC

Les organisations syndicales et la maison des livreurs ont pu décrire la réalité extrêmement précaire des travailleurs des plateformes de livraison et la dégradation de leurs conditions de travail et de rémunération : absence de salaire minimum du fait d’une rémunération à la tâche, de plus divisée par deux en quelques années, absence de protection sociale et augmentation des accidents de travail non reconnus comme tels, aucune prise en charge des frais (téléphone et transport), sous traitance en cascade… Les plateformes n’hésitent pas par ailleurs à surexploiter des travailleurs sans-papiers. Rien qu’à la Maison des Coursiers, 75% des livreurs qui la fréquentent sont sans-papiers. Pourtant, alors qu’ils travaillent pour beaucoup 6 jours par semaine, ces derniers ne peuvent bénéficier de la régularisation par le travail tel que prévu par la circulaire Valls de 2012 puisque celle-ci se base sur des bulletins de salaires impliquant d’être salarié. Surexploités lors des confinements, nombre d’entre eux ont été depuis déconnectés. 

Les organisations de chauffeurs qui seraient favorables à la défense d’un vrai statut d’indépendant estiment que les chauffeurs devraient avoir la maîtrise de leurs tarifs et l’accès au partage de la valeur aujourd’hui engrangée sur leur dos par les plateformes. 

  1. L’ ARPE d’E. Borne

Lorsqu’elle est ministre du Travail en 2021, Elisabeth Borne crée l’Autorité des relations sociales des plateformes d’emploi (ARPE) pour organiser le dialogue social entre les travailleurs et leurs plateformes. Elle choisit B. Metling, bien qu’ayant été rémunéré par Uber, pour la présider. Une écrasante majorité des travailleurs de plateformes ont boycotté l’élection à cette autorité (4% de participation aux dernières élections). Différentes organisations syndicales ont dénoncé les conditions d’élections.  Celles qui ont choisi de siéger à l’ARPE dénoncent l’impossibilité de passer quelque accord sans l’aval d’Uber puisque la plateforme américaine est majoritaire dans la représentation des plateformes et qu’il est nécessaire d’obtenir au moins 50% de leurs voix. Elles dénoncent le niveau très bas du tarif minimum de la course VTC (7,65€). 

L’ARPE prétend aborder les thématiques des droits sociaux des travailleurs ubérisés tout en excluant à la fois l’option de leur requalification en salarié, ainsi que le respect entier d’un véritable statut d’indépendant. Dans les faits, cette instance semble construite sur mesure pour les intérêts d’Uber qui ne cesse de défendre un tiers statut : de maigres droits comme l’accès à une complémentaire santé, la fixation de tarifs minimums, pour empêcher cette requalification en salarié… 


Retrouvez ma dernière vidéo sur Youtube sur cette deuxième série d’auditions !

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