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Notre devoir de mémoire sur l’autre 8 mai 45

Le 8 mai dernier, nous commémorions la victoire contre le nazisme. 

Mais l’histoire de l’autre 8 mai 1945, c’est celle des répressions sanglantes de manifestations indépendantistes en Algérie, à Sétif, Guelma et Kherrata.
Avec Elsa Faucillon, Fatiha Keloua Hachi et Sabrina Sebaihi nous créons un groupe de travail pour la reconnaissance de ces crimes, l’ouverture des archives, le devoir de mémoire et de transmission.

Tribune des députées NUPES Elsa Faucillon, Fatiha Keloua-Hachi, Sabrina Sebaihi et Danielle Simonnet des groupes parlementaires GDR, socialiste, écologiste et La France insoumise

Nous, Elsa Faucillon, Fatiha Keloua-Hachi, Sabrina Sebaihi et Danielle Simonnet, députées NUPES des groupes parlementaires GDR, socialiste, écologiste et La France insoumise, avons décidé de constituer un groupe de travail dont l’objectif est que soient enfin officiellement reconnus les massacres commis en Algérie à Sétif, Guelma et Kherrata le 8 mai 1945, que l’accès total aux archives puisse être assuré aux historiens et que ce devoir de mémoire soit intégré aux programmes d’histoire afin d’en faciliter la transmission. 

Le 8 mai 1945, alors que le peuple français fêtait l’armistice, la paix retrouvée et la victoire sur le nazisme, commençaient en Algérie, à Sétif mais aussi à Guelma et Kherrata, des répressions sanglantes de manifestations nationalistes, indépendantistes et anti-colonialistes.

Ce 8 mai 1945, dans la rue principale de Sétif en Algérie, de nombreux Algériens s’étaient tout d’abord rassemblés pacifiquement pour fêter l’armistice mais aussi exiger la libération du dirigeant nationaliste Messali Hadj, et défendre « l’Algérie libre » pour laquelle ils avaient conçu un nouveau drapeau, symbole de leur lutte pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et pour l’indépendance. Bouzid Saâl, un jeune scout qui avait brandi ce drapeau algérien fut assassiné à Sétif. S’ensuit une émeute anti européens qui fit une centaine de morts. 

Pendant plusieurs semaines et même plusieurs mois jusqu’en août 1945, l’armée française et de nombreuses milices coloniales, composées de civils d’origine européenne, ont alors fait régner la terreur pour rétablir l’ordre colonial et défendre l’Algérie française. Si le nombre des victimes algériennes, officiellement toutes françaises à l’époque mais qui ne l’étaient pas en fait et en droit, est difficile à établir, car encore sujet à débat presque 80 ans plus tard, le gouvernement algérien avance le nombre de 45 000 morts et les travaux de la très grande majorité des historiens français attestent d’un bilan d’au moins de dizaines de milliers de victimes arrêtées, torturées et exécutées sommairement. 

Le 27 février 2005, lors d’une visite à Sétif, M. Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France à Alger, a qualifié les « massacres du 8 mai 1945 » de « tragédie inexcusable » et son successeur M. Bernard Bajolet a déclaré à Guelma en avril 2008 devant des étudiants algériens que « le temps de la dénégation des massacres perpétrés par la colonisation en Algérie est terminé ». En 2015, plusieurs municipalités dont la Ville de Paris faisaient adopter des vœux en faveur de cette reconnaissance. Il est grand temps d’aller plus loin. 

L’an prochain nous commémorerons les 80 ans de ces crimes. Ces crimes commis par l’État français et ceux qui le servaient, ne sont toujours pas reconnus officiellement, alors qu’ils font partie intégrante de l’histoire de France. Une telle situation est inacceptable, car elle ajoute à ces massacres l’outrage aux victimes, à leurs descendants et à leurs proches. Cette page de l’histoire est à la fois française et algérienne et la reconnaître contribuerait à consolider la fraternité entre le peuple Algérien et Français. Reconnaître ce massacre commis par l’Etat français permettra à tous nos 

concitoyens, et notamment ceux issus de l’immigration algérienne, de se construire toujours plus fraternellement dans un avenir commun, celui de la communauté légale républicaine, où toutes les mémoires se doivent d’être respectées. 

Notre groupe de travail s’engage à organiser des auditions des associations impliquées dans la bataille pour la reconnaissance de ces crimes, des chercheurs engagés par leurs travaux sur ces évènements. Notre groupe de travail porte l’ambition d’installer ce débat et prendra des initiatives tels qu’un colloque, des réunions publiques et déplacements en Algérie à Sétif, Guelma et Kherrata. Il souhaite à l’issu de ses travaux être en capacité de porter, début 2025, une proposition de loi commune pour la reconnaissance de l’Autre 8 mai 1945, pour leur commémoration 80 ans après.  

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