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Les profits d’Engie, autant protégés par Castex que par Hidalgo !

Dans une interview pour Libération, Anne Hidalgo annonce qu’elle défend la baisse des carburants. Certains pourront être surpris de ce revirement de la candidate qui en 2018 défendait au contraire la taxe carbone comme l’alpha et l’oméga pour sortir des énergies carbonées. La candidate à la Présidentielle tente de déparisianiser son profil et se présenter comme celle qui défend une écologie sociale pour se démarquer de Yannick Jadot. Les hausses des tarifs de l’énergie frappent plus durement les classes populaires. Voyons donc comment elle s’attèle à ces prix en tant que maire de Paris, là où elle est en fonction : non pas sur le prix de l’essence mais celui du chauffage. Et ça tombe bien, car au prochain Conseil de Paris le schéma directeur 2020-2050 sur le réseau de chaleur parisien sera présenté et très certainement adopté. 

Figurez-vous que dans la délibération, tout se passe comme si le contexte marqué de fortes augmentations du prix de l’énergie d’un côté, et les explosions des bénéfices des fournisseurs d’énergie de l’autre, n’existait pas. Quand Castex n’envisage pas une seule seconde de taxer les bénéfices des fournisseurs d’énergie, Hidalgo n’envisage pas une seule seconde un retour en régie publique de la CPCU…

Le service public de distribution de chaleur par les réseaux de vapeur ou d’eau chaude sur le territoire de la ville de Paris est concédé à la Compagnie Parisienne du Chauffage Urbain (CPCU), dans laquelle le groupe ENGIE est largement majoritaire. Il est bien signifié dans le schéma directeur que la date d’échéance du contrat de concession est le 31 décembre 2024, mais le débat sur le mode de gestion n’est jamais posé ! 

Les ambitions écologiques de verdissement du réseau (pour 100% d’ENR à terme), prenant en compte l’impact de la réduction des déchets et donc de la réduction à venir de la valorisation énergétique sont détaillées, ainsi que les enjeux de résilience, à savoir les investissements dans la modernisation du réseau pour faire face notamment au risque de crue accrue et aux problématiques de fuites du réseau. 

Pour financer tout cela, le schéma directeur envisage de recourir aux subventions de  l’ADEME et/ou de l’État, de la Région Île-de-France, de la Ville de Paris, voire de l’Union européenne et de développer une stratégie de densification du réseau permettant l’augmentation des usagers abonnés, et la possibilité “de lisser dans le temps le tarif et les investissements nécessaires”. En gros, à l’arrivée, ce seront les usagers-contribuables qui payeront la note, sur leur facture et via les impôts. 

La ville semble totalement passer sous silence le dernier rapport de la CRC de décembre 2018 sur la CPCU, qui décrivait bien que l’objectif principal d’ENGIE était d’atteindre une rentabilité de 8%. Les augmentations de tarif payées par les usagers avaient clairement servi à augmenter la rentabilité de la CPCU pour le groupe ENGIE. Le résultat opérationnel de la concession était de 57M€ en 2016, en augmentation de 10%, et tous ces indicateurs indiquaient une augmentation de la rentabilité, découlant directement de la hausse des tarifs. Le tribunal administratif de Paris avait par la suite en janvier 2020 déclaré illégale la grille tarifaire de la CPCU, et l’absence de contrôle et de réactions de la Ville de Paris avaient été dénoncés.

Pour rappel, l’ONG Oxfam, entre 2009 et 2016, avait montré que le taux de distribution des bénéfices du groupe ENGIE avait atteint 333 % (pour 100 euros de bénéfices, l’actionnaire d’Engie a gagné 333 euros de dividende), qu’en 2016, Engie avait versé quinze fois plus de dividendes que ce qu’elle n’avait fait de bénéfices…  La CPCU gérée par Engie, elle, verse chaque année 6 à 13 millions d’euros de dividendes, c’est pas rien !

Finalement, Anne Hidalgo s’apprête à faire du pur Castex. Face aux hausses des tarifs de l’énergie et notamment du gaz, loin d’instaurer un “bouclier tarifaire” comme il le promet, le Premier Ministre se cantonne en effet à un blocage des prix du gaz et de l’énergie de novembre 2021 à avril 2022, après leurs hausses successives, et qui plus est financé de fait par le consommateur-contribuable, via là aussi un “lissage tarifaire” pour les consommateurs, intégrant par anticipation une diminution des baisses des tarifs prévues au printemps et via l ’augmentation du chèque énergie, financée par la TVA sur la hausse, donc par les contribuables… En résumé, sur 5 ans, pour 3 millions de foyers français qui se chauffent au gaz, la facture de gaz a augmenté de 500 euros. Le gouvernement pourrait, comme le propose Jean-Luc Mélenchon, en prenant seulement 10% des bénéfices des fournisseurs d’énergie, rendre tout de suite 500 euros à ces 3 millions de foyers. Mais il n’en sera rien, Castex préservant les intérêts des actionnaires. 

A la Ville de Paris, si on choisissait le retour en régie direct, les millions d’euros de bénéfices qui n’iraient pas grossir les poches d’Engie et de ses actionnaires reviendraient à la ville, et pourraient se traduire, en de plus forts investissements pour la transition énergétique, en baisse tarifaire ou en abondements du Fonds de Solidarité pour le Logement (FSL) qui a pour objet d’accorder des aides notamment aux personnes en situation de précarité énergétique qui n’arrivent plus à payer leur factures d’énergie. Le retour de l’eau en régie publique a bien permis de fortes baisses des factures d’eau, une amélioration qualité du réseau contre les fuites, et l’instauration d’une tarification sociale. Mais ça, c’était avant… 

Alors sur l’énergie, pourquoi ne pas y travailler ? 

Parce que Hidalgo, ça reste du Castex…..

Mon vœu au conseil de Paris pour un retour en régie directe de la CPCU.

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