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Le confinement parisien au 5 novembre…

Ce jeudi, Anne Hidalgo était l’invitée de Jean-Jacques Bourdin. Dans cette note je souhaiterais revenir autant sur les sujets abordés par la maire de Paris que sur les sujets occultés. L’occasion de vous faire partager les informations que j’ai pu collecter de différents militants associatifs, syndicalistes et travailleur.euses de terrain. Si l’info reprise en boucle par les médias est celle de la fermeture à 22h des commerces, je ne commencerai pas par ce sujet, car il n’est selon moi absolument pas le plus important. 

La fermeture des urgences de l’Hôtel-Dieu occultée

Tout d’abord, alors que la crise sanitaire est étroitement liée à la crise hospitalière, je regrette que la maire n’ai rien dit de l’annonce de la fermeture des urgences de l’Hôtel Dieu depuis ce mercredi 4 novembre. C’est une décision scandaleuse et irresponsable de la direction de l’AP-HP et donc du gouvernement. L’hôtel-Dieu pourrait servir à accueillir les patients covid ne nécessitant pas de services de réanimation mais d’oxygénothérapie. Ou bien l’hôtel-Dieu pourrait accueillir des patients non covid afin de délester les autres hôpitaux qui se retrouvent à devoir déprogrammer des hospitalisations face à l’afflux de cas covid. Cette fermeture est une aberration, qui plus en situation d’alerte attentats. La Maire de Paris, en tant que Présidente du conseil de surveillance de l’AP-HP ne peut rester muette sur une telle décision ! Comment expliquer ce silence sinon par sa complicité depuis 2014 dans ce projet de privatisation d’un tiers de l’Hôtel dieu visant à installer des logements étudiants (ce dont je ne conteste pas la pertinence) mais aussi des start-up de santé, des commerces et un restaurant gastronomique ? Ce projet doit être abandonné et les urgences doivent immédiatement être rouvertes. 

L’urgence des sans abris, l’urgence de la pauvreté à peine abordées

Ce sujet n’aura été abordé que pendant 40 secondes… D’ailleurs le sujet avait été totalement occulté par le Président et le Premier ministre. Sur le terrain, la situation est très problématique. Le SIAO, la plateforme d’orientation vers l’hébergement du Samu social a subi un énorme bug informatique et les logiciels ne sont pas encore totalement restaurés. La saturation de l’hébergement d’urgence fait qu’il n’y aurait à peine qu’1% de réponse positive d’hébergement dans les appels du 115, soit à peine 60 orientations par jour. Beaucoup n’appellent même plus le 115. Plus de 1000 familles avec enfants appelleraient chaque jour sans obtenir la moindre solution. Si l’Etat se prépare enfin à conclure des accords avec les hôtels afin de mettre à disposition des chambres (une aubaine pour les hôteliers qui seront du coup payés alors qu’ils n’ont pas sans cela de clientèle) et à ouvrir de nouveaux centres d’hébergements, l’incertitude reste entière sur le nombre de places à l’arrivée et surtout leur pérennité dans le temps. Mais surtout, l’absence d’anticipation fait que les structures associatives, à même de gérer ces places et de mettre à disposition des travailleurs sociaux indispensable dans l’accompagnement de l’hébergement, sont confrontées à de grosses difficultés de trésorerie : elles ne toucheront leurs financements que fin décembre. Comment avancer ? Pour l’heure, 2500 personnes du campement de la Porte de Paris à Saint Denis et les familles reposées vers Aubervilliers doivent être évacuées et relogées d’urgence. Une personne est décédée sur ce campement en début de semaine. Le Samu aurait mis plus de 3h avant d’intervenir… Pourquoi ? Toutes les vies ne se valent pas ? 

Autre urgence, alimentaire cette fois. Les associations, les collectifs citoyens se démènent pour organiser les collectes. Mais c’est sur les laits infantiles que la pénurie est tragique et révèle l’absence d’anticipation de l’ensemble des pouvoirs publics. 

Côté prévention sanitaire, les passations de tests dans les centres d’hébergement, avec les tests antigéniques permettent d’être plus réactifs mais les clusters y seraient néanmoins nombreux. 

Police municipale…. à chacun ses priorités ? 

Faut-il le rappeler, en cette période d’alerte attentats, la lutte contre les terroristes ne peut que relever des fonctions régaliennes de l’Etat. Toute création de police municipale provoque mécaniquement de la part du gouvernement une baisse des moyens humains de la police nationale affectés sur les territoires concernés. Mais Hidalgo y tient et le débat à l’Assemblée nationale va avoir lieu pour permettre à Paris de créer sa propre police municipale… Je n’y suis pas favorable. Que le débat s’engage enfin sur les moyens, la formation et la fin de la politique du chiffre dans la police républicaine, pour qu’elle le reste voire qu’elle le redevienne ! La volonté du ministre Darmanin d’interdire de filmer les policiers et d’en diffuser les images est des plus inquiétantes. Voilà la réponse de ce gouvernement dans sa pente autoritaire accélérée aux dénonciations du printemps dernier des violences policières et du racisme systémique dans la police ! Rien à attendre d’Hidalgo pour s’y opposer… En attendant, cette future police municipale avait été évaluée à un cout d’au moins 60 millions d’euros par an, soit l’équivalent de 4600 places d’hébergement d’urgence avec accompagnement social… De quoi résoudre la crise du sans-abrisme….

Rentrée scolaire et protocole sanitaire

Dans une impréparation totale du gouvernement et du Rectorat, la rentrée scolaire de lundi n’a pas été accompagnée de dédoublements de classes. Les mobilisations d’enseignants et de lycéens, qui ont de suite subi la répression des lacrymos de la police, commencent à faire bouger les lignes. Au moins dans certains lycées, des protocoles sont à l’étude pour envisager des dédoublement, des alternances de cours en présentiel et à distance. La maire de Paris a rappelé que la ville de Paris avait transmis au rectorat le recensement des lieux, type bibliothèques, théâtres, pouvant être mis à disposition des lycées. Par ailleurs, il est fort probable que dans les écoles maternelles et primaires, des problèmes se posent pour le respect de règles sanitaires : cantines et salles de classes trop petites… Du personnel supplémentaire a-t-il été embauché pour assurer le nettoyage ? Pas à ma connaissance… La circulation du virus est bien pire que lors du premier confinement. Alors même que l’on sait que les clusters sont nombreux dans les établissements scolaires, les protocoles sont bien plus allégés. Jusqu’à quand ? La mobilisation profs et lycéens autour d’une grève sanitaire prévue le 10 novembre relève bien de l’intérêt général. 

La défense des librairies… entre sincérité et hypocrisie

La maire de Paris défend à juste titre le maintien de l’ouverture des librairies. Il serait par ailleurs utile d’entendre également les exigences des salariés des libraires et petits commerces qui exigent le respect partout de protocoles sanitaires. Voir le gouvernement se mettre à lister les commerces “non essentiels”, pour en modifier la liste dès le lendemain, puis courir faire fermer certains rayons des grandes surfaces est un spectacle bien désolant. A quand une taxation des profiteurs de la crise, grandes surfaces et Amazon pour en redistribuer les recettes afin de défendre le petit commerce ? Rien. 

Par ailleurs, rappelons néanmoins deux choses aux élu.es si nombreux qui se soucient de la défense de leurs petits commerces : ils ont souvent été les premiers à étendre l’ouverture dominicale des grandes enseignes au mépris des intérêts du petit commerce, sans parler de leur asphyxie due aux créations de nouveaux centres commerciaux. 

Fermeture des commerces à 22h… avant un nouveau couvre-feu ? 

En raison de “débordements dans un certain nombre de cas où il y avait des attroupements”, la préfecture va fermer les commerces et débits de boissons à 22h ainsi que les restaurants qui faisaient de la vente à emporter. Rappelons déjà que la propagation du virus se fait selon les épidémiologistes principalement en milieu fermé et non dehors dans la rue. Quelles aides ont été prévues pour l’ensemble des livreurs à vélo déjà si surexploités par les plateformes et qui ne pourront plus travailler aux horaires où ils avaient le plus de commandes ? Et pour les restaurants qui tentaient de survivre via ces ventes à emporter ? 

Ce qui se prépare par ailleurs, c’est très certainement l’annonce d’un couvre feu. Après le cafouillage de son annonce en début de semaine par le porte-parole du gouvernement, désavoué peu de temps après par le gouvernement, la mesure devrait être de nouveau annoncée. Mais qui peut croire que cela va s’avérer efficace pour ralentir la propagation du virus ? Le confinement actuel est celui de nos temps libres quand c’est surtout au travail et à l’école que se situent les clusters ! 

Et le télétravail à la ville, pourquoi se fait-il à minima comme en juin ???

La ville avait promis en juin l’ouverture de négociations sur un nouveau cadre pour le télétravail. Mais ça traîne. En CHSCT, la direction des ressources humaines a osé annoncer qu’elle n’avait pas eu le temps de préparer un Plan de continuité de l’activité prenant en compte le reconfinement, alors même que cette hypothèse ne pouvait être occultée depuis longtemps ! Et que dès juin, les discussions sur le télétravail étaient annoncées ! Aussi, les organisations syndicales avaient demandé qu’un CHSCT se tienne dès début octobre. Pourquoi avoir autant tardé ? Depuis le début de la semaine, nombre d’agents dont l’activité pourrait se faire en télétravail et donc devrait se faire en télétravail, ne savent pas s’ils doivent venir ou rester chez eux… A l’arrivée, le document présenté aux organisations syndicales prévoirait un télétravail au même niveau qu’en juin, période pendant laquelle le virus circulait 100 fois moins qu’aujourd’hui !!! 

Reste l’histoire de la prime pour le télétravail, promise et d’un montant de 300€. Elle avait été accordée à un chiffre ridiculement bas, soit 2250 agents quand la ville en compte au moins 50 000. La disproportion serait totale pour les personnes bénéficiaires ; quasi que des cadres A, et aux deux tiers des hommes… Et pour la suite ? Une augmentation réduite à 10€ par mois serait envisagée par la ville pour les agents faisant le choix du télétravail….

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